24 avril 2015 5 24 /04 /avril /2015 20:01

Burton reste d'un classicisme désespérant. Certes, le film est plaisant et la reconstitution parfaite, tout comme le jeu des acteurs, l'ensemble est ponctué d'humour, mais ceux qui voulaient voir du Tim Burton seront déçus.

 

BIG EYES raconte la scandaleuse histoire vraie de l’une des plus grandes impostures de l’histoire de l’art. À la fin des années 50 et au début des années 60, le peintre Walter Keane a connu un succès phénoménal et révolutionné le commerce de l’art grâce à ses énigmatiques tableaux représentant des enfants malheureux aux yeux immenses. La surprenante et choquante vérité a cependant fini par éclater : ces toiles n’avaient pas été peintes par Walter mais par sa femme, Margaret. L’extraordinaire mensonge des Keane a réussi à duper le monde entier. Le film se concentre sur l’éveil artistique de Margaret, le succès phénoménal de ses tableaux et sa relation tumultueuse avec son mari, qui a connu la gloire en s’attribuant tout le mérite de son travail.

24 avril 2015 5 24 /04 /avril /2015 19:54

Bien qu’ayant perdu son travail, Michel vit heureux avec Marie-Claire. Ces deux-là s’aiment depuis trente ans. Leurs enfants et leurs petits-enfants les comblent. Ils ont des amis très proches. Ils sont fiers de leurs combats syndicaux et politiques. Leurs consciences sont aussi transparentes que leurs regards. Ce bonheur va voler en éclats avec leur porte-fenêtre devant deux jeunes hommes armés et masqués qui les frappent, les attachent, leur arrachent leurs alliances, et s’enfuient avec leurs cartes de crédit… Leur désarroi sera d’autant plus violent lorsqu’ils apprennent que cette brutale agression a été organisée par l’un des jeunes ouvriers licenciés avec Michel.

24 avril 2015 5 24 /04 /avril /2015 19:05

 

A la suite d'une maladie, Helen Keller, une petite fille de sept ans, perd l'usage de la parole, de la vue et de l'ouïe. Ses parents font alors appel à Annie Sullivan, une jeune éducatrice, pour ramener l'enfant à une vie normale. Mais celle-ci va devoir face à l'hostilité d'Helen et de ses parents effrayés par ses méthodes.

24 avril 2015 5 24 /04 /avril /2015 13:09

Après 39 ans de vie commune, George et Ben (Alfred Molina et John Lithgow) ont pris la décision de se marier. Tout le monde se réjouit, familles et amis, tout le monde applaudit. Enfin non, pas tout le monde! George est vite convoqué par le directeur de l'école religieuse où il enseigne la musique pour lui signifier son licenciement! Jusque là on pouvait tolérer son homosexualité, mais à présent qu'elle est officialisée par un mariage, pas question! C'est la porte!

Cette décision brutale va entraîner le couple dans la dégringolade. Non pas qu'ils ne s'aiment plus, bien au contraire, mais les problèmes financiers auxquels ils doivent faire face les obligent à quitter leur appartement cossu et, en attendant qu'ils trouvent quelque chose de plus modeste, à se réfugier, chacun de leur côté, chez leurs proches. Aussitôt mariés, les voilà donc séparés par la force des choses. Et, pour ceux qui veulent bien les accueillir, la cohabitation ne sera pas des plus faciles.

C'est un beau film à la fois mélancolique, tendre et cruel qu'a réalisé Ira Sachs. Une histoire d'amour déchirante en même temps que l'histoire de deux solitudes, de deux êtres presque résignés et d'autant plus touchants.

24 avril 2015 5 24 /04 /avril /2015 12:34

A Cannes, entre deux films exigeants, on avait donc vu en compétition officielle ce film argentin. Une suite de sketches sur des pétages de plomb, avec quelques références cryptées pour cinéphiles : l'un des épisodes évoque Duel, de Steven Spielberg, un autre est une variation burlesque sur l'un des films les moins connus de Nuri Bilge Ceylan, Les Trois Singes. Mais tout, jusqu'au titre, prétend rappeler d'abord la grande comédie italienne de jadis : les films de Pietro Germi, d'Ettore Scola et, bien sûr, Les Monstres de Dino Risi et sa suite, au moins aussi réussie. Problème : si les histoires sont caustiques à souhait pour la plupart, elles sont filmées avec les pieds. Pis que tout : le réalisateur, qui se voudrait truculent, n'est que vulgaire. Et ça, ça ne pardonne pas...

On aura tout de même de l'indulgence pour l'histoire du brave type (Ricardo Darín) qui sombre dans le terrorisme par la faute d'une voiture mal garée et de la bêtise de fonctionnaires particulièrement bornés. Mais c'est, de loin, le prologue qui est le plus drôle. Dans un avion, un critique musical quinquagénaire drague une top model. Ils se découvrent une connaissance commune : un certain Pasternak. Lui l'a laminé lors d'un examen. Elle l'a trompé avec son meilleur ami qui, quelle coïncidence, fait partie du vol... Peu à peu, comme dans un roman d'Agatha Christie, on réalise que tous les passagers ont eu affaire à ce Pasternak qui, en pleine crise, les a réunis. C'est affreux, suave et méchant. Implacable comme la fatalité en marche. Pierre Murat Télérama

 

14 avril 2015 2 14 /04 /avril /2015 11:36

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Au xixe siècle, à l'institut de Larnay, à Poitiers, une jeune religieuse apprend à communiquer à une adolescente sourde, muette et aveugle. Jean-Pierre Améris raconte l'histoire vraie de soeur Marguerite (Isabelle Carré) qui, refusant de considérer comme désespéré le cas de Marie Heurtin, mit au point une méthode (toujours utilisée) basée sur le toucher... Un « petit animal sauvage » sauvé par une bonne soeur : le sujet pouvait laisser craindre un film empesé de bons sentiments. Mais, en dehors du plan final — un long regard appuyé de Marie vers le ciel —, le cinéaste privilégie le physique au spirituel : il filme le combat acharné de deux êtres qui luttent pour parvenir à communiquer (c'était déjà le cas dans sa comédie Les Emotifs anonymes)... Quand la mort surgit, en revanche, le combat devient solitaire et soeur Marguerite s'enferme à son tour dans le silence...

Respectueux et tendre, cet éloge de la patience touche par ses partis pris esthétiques : les cadrages sur les doigts de Marie (ses seuls « outils » de langage) et sur sa nuque quand elle accepte, enfin, qu'on lui brosse les cheveux. Les couleurs, entre gris pensionnat et bleu cornettes, évoquent les toiles de Degas, ses femmes à la toilette... Pour Améris, la beauté, sinon Dieu, est dans le détail. — Guillemette Odicino Télérama

14 avril 2015 2 14 /04 /avril /2015 10:32

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En avril 2012, la ville de Tombouctou tomba aux mains des djihadistes, qui soumirent la population à la loi islamique, jusqu'à l'intervention des militaires français et maliens, en janvier 2013. Avec une réactivité digne de Holly­wood, où l'actualité brûlante est vite recyclée en sujet de film, le réalisateur mauritanien Abderrahmane Sissako reconstitue cette occupation pour le grand écran. Il le fait avec une formidable liberté. Timbuktu n'a rien de ces films à chaud, mimant l'urgence d'une réalité bouleversée. C'est une oeuvre réfléchie qui affirme ses choix, souvent audacieux. Une oeuvre de courage.

Une gazelle s'enfuit, poursuivie par des djihadistes dans une jeep. Des masques africains traditionnels se brisent sous les balles. Dès les premières images, Sissako, qui a un oeil d'esthète (Bamako, 2006), parle dans un langage visuel, symbolique et universel. Un Touareg qui vit avec sa femme et sa fille dans les dunes, près de Tombouctou, incarne le bonheur, l'harmonie — pres­que trop parfaitement. Mais autour d'eux, les autres tentes ont dis­paru : la terreur a fait le vide. L'image du bonheur est donc aussi l'image d'une résistance. Comme celle de ce groupe d'amis qui, dans la nuit, chantent et font de la musique. La scène prend une valeur exemplaire : gratter une guitare, c'est braver l'interdit de la loi islamique. Fredonner une chanson, c'est un cri d'indépendance.

Les extrémistes religieux ont rendu la population de Tombouctou héroïque, nous dit Sissako. D'une femme qui vendait des poissons dans les rues, ils ont fait une allégorie de la liberté : parce qu'elle a refusé de se soumettre à leur pouvoir et de couvrir ses mains. La logique des représentations traditionnelles s'inverse : les asservis sont montrés avec grandeur, comme des icônes, et les oppresseurs sont, eux, des figures presque banales. L'un d'entre eux, Abdelkrim, est un homme en conflit avec les interdits qu'il est chargé de faire respecter et avec les désirs qu'il est censé condamner. Il se cache pour fumer, il convoite une femme mariée qu'il courtise comme un adolescent maladroit et ridicule.

Faire des fanatiques des histrions de comédie, c'est leur infliger une gifle magistrale. Dans la guerre de l'organisation de l'Etat islamique, les images des combattants (notamment français) sont des outils de propagande. Dans Timbuktu, le pouvoir de ces images est brisé : les guerriers ne sont que des pantins. Depuis sa présentation à Cannes, où le jury l'a incompréhensiblement ignoré, le film paraît avoir encore gagné en pertinence. Chaque plan ruine l'entreprise de terreur des djihadistes. Sans, pourtant, mésestimer leur pouvoir. Quand l'horreur surgit (la lapidation), elle est repoussée par une scène étonnante où Abdelkrim, envoûté peut-être par une magicienne de la ville, dépose les armes et se met à danser, à faire l'oiseau.

Aux barbares obnubilés par des sacrilèges minuscules (un ourlet de pantalon trop court ou trop long), le film oppose une vision plus vaste. Une interrogation sur l'humanité et la violence. Au milieu d'une étendue d'eau dans le désert, un homme en tue un autre et ce crime n'a rien à voir avec l'islam. Dans ce décor presque biblique, c'est une haine et un meurtre à la Caïn et Abel qui ont surgi, vieux comme le monde. Heureusement, des lois, des valeurs demeurent pour celui qui reconnaît sa faute, pour celui qui pardonne. La sauvagerie n'est jamais devenue la norme. Toutes les tyrannies ont été combattues et celle des djihadistes ne triomphera pas, affirme Sissako. Qui admet seulement leur pouvoir de nous jeter dans un monde chaotique : il le décrit sur le ton de la fable à travers l'histoire d'une vache perdue, qui s'appelait GPS... Pour nous aider à ne pas être désorientés restent l'intelligence, l'esprit, l'humour, le raffinement, la beauté. Toutes les qualités de Timbuktu. — Frédéric Strauss Télrama

1 avril 2015 3 01 /04 /avril /2015 09:03

 

 

013122.jpgChronique d'une jeunesse en banlieue (la cité des 4 000, à La Courneuve), au tournant des années 1980. Le portrait de groupe que propose Sylvie Ohayon, d'après son livre autobiographique, est fervent, attachant, mais plombé par la démonstration : le melting-pot, l'amitié et la réussite républicaine terrassent les galères en tout genre comme dans un conte trop naïf.

1 avril 2015 3 01 /04 /avril /2015 07:34

 

 

 

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La triangulation amoureuse vue par le réalisateur qui parcourt et décrypte depuis Les Yeux clairs en 2004 la carte du Tendre, celle-là même qui répertorie tous les chemins sinueux et les méandres complexes des sentiments, c’était une promesse excitante. Une sorte de relecture de Jules et Jim, portée par trois jeunes comédiens sympathiques et épatants : Anaïs Demoustier (Mélodie) dont la filmographie fournie ne comporte ni faux pas ni temps mort, Félix Moati (MIcha) qui a hérité de son père journaliste la candeur et la bonhomie (en plus d’une frimousse particulièrement avenante) et Sophie Verbeeck qui joue Charlotte (l’élément faiblard du trio qui a trop dû regarder Emmanuelle Béart).

Hélas, cette variation à géométrie variable qui oscille entre vaudeville et romance frise l’inconsistance et l’insignifiance dans sa capacité à déborder son sujet et à jouer davantage de la transgression, préférant étirer le préambule et les prémices de ce qui arrivera inévitablement et résoudre l’ensemble dans une pirouette paresseuse, bâclée, presque saugrenue. Ce sont les séquences drolatiques revisitant les codes éculés du motif vaudevillesque (l’amant dans l’armoire) qui sont les plus réussies. Mélodie devant s’enfuir au retour prématuré de Micha par les toits, le trio se retrouvant à la même fête suite à une série de quiproquos bien ficelés allègent une narration qui finit par s’essouffler dans les scènes de tendresse et de sexe.

La question d’un amour multiple qui ne se limiterait pas à une seule personne est ainsi à peine approfondie : quid du vertige, de l’anticonformisme alors que, justement, le film s’enlise dans un certain immobilisme jusqu’à y disparaitre totalement. Bien sûr, À trois on y va ne manque pas de charme, le Lille de Jérôme Bonnell a des faux airs d’un Paris branché et la météo (le 14 juillet, l’été, le soleil) achève de le limiter à quelque chose d’infiniment léger, quasiment inconséquent. En tout cas, bien loin de la confusion et du vacillement des sentiments qu’une telle déflagration (l’amour identique pour deux personnes dans un triangle parfaitement équilatéral) devrait produire.

Sens Critique le 28 mars 2015

26 mars 2015 4 26 /03 /mars /2015 14:42

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Suzanne, comme le standard de Leonard Cohen. Et le titre longtemps envisagé par Pialat pour A nos amours. Entre le lyrisme de la chanson et le naturel du film, Suzanne est aussi, désormais, le récit fulgurant d'une jeunesse sur un fil. Enceinte à 17 ans, elle décide de garder l'enfant. Amoureuse d'un délinquant à 20 ans, elle laisse son fils derrière elle pour vivre sa passion.

L'intensité du deuxième long métrage de Katell Quillévéré (après Un poison violent) tient beaucoup à ce qu'il élude. Des périodes de plusieurs années sont laissées en blanc. Les cavales, la violence et les délits ne sont pas montrés. Leurs conséquences sur les visages et les sentiments, oui. Autre belle idée, la présence fantomatique, tenace, de Suzanne quand elle disparaît des radars : la cinéaste filme ceux qui restent, dévastés par l'inquiétude. C'est la trajectoire d'une seule, absente, qui rythme et façonne l'existence d'un père, d'une soeur, d'un enfant. Suzanne vit. Les siens ne font que s'adapter. Sara Forestier illumine ce personnage de grande amoureuse fatale : on ne l'avait pas vue aussi émouvante depuis L'Esquive, d'Abdellatif Kechiche, son premier film. — Louis Guichard Télérama